Le travail de rédaction reprend son rythme, puis dans l’après-midi, une connaissance d’Yves vient nous chercher en voiture pour nous emmener chez lui un peu en dehors de Montréal.
Mokhtar se souvient avoir rencontré Yves la première fois en 1995 pour une conférence AIM à Namur. Il est à présent professeur à l’Université de Kingston, à mi-chemin entre Montréal et Toronto, au bord du lac Ontario, soit à plus de 270 km de son domicile! Il donne peu de cours et l’avantage de l’âge et de l’ancienneté lui octroie de n’enseigner que durant l’été. Au Canada, il n’y a pas d’âge de retraite; ainsi il nous raconte avoir un collègue de huitante-neuf ans.
Il n’est pas très tard mais nous sommes dans les bouchons du vendredi, quittant Montréal vers l’ouest. Le Canada ne connaît pas les ronds-points comme nous en avons tant vus naître chez nous; ici à un carrefour en croix, chacun marque le stop et c’est le premier arrivé qui repart le premier … cela me rappelle les souvenirs de conduite à Vancouver. Il nous semble également que les vélos respectent bien plus les feux de circulation ici qu’en Europe. Il y a énormément de travaux, ce qui ralentit le trafic sur l’Autoroute du Souvenir – joli nom!
Nous aurons ainsi presque une heure à discuter dans la voiture – trois fois plus que sans circulation – passant près de Lachine, Dorval, Pointe-Claire. Nous lui racontons nos voyages et découvertes; cela l’amuse car sa famille ou ses amis en visite veulent tous aller aux Chutes du Niagara et à New-York … nous savons ce qu’il nous reste à faire.
Dans un domaine autre, selon lui, les deux mets à tester absolument ici à Montréal sont la smoked meat de chez Schwartz sur St. Laurent et les fameux bagels du Fairmont. Et il vient à parler ensuite d’un sujet qui retient mon attention : l’alimentation comme troisième médecine. À l’origine, l’analyse vient d’un professeur de Montpellier, Dr Jean Seignalet et le thème sera repris, testé par elle-même et vulgarisé dans un ouvrage d’une doctoresse de Montréal, Jacqueline Lagacé. On y traite de choix des aliments mais aussi du mode et de la température de cuisson; un sujet de lecture dans lequel je me plongerai sans doute un jour.
Nous arrivons à Beaconsfield, à l’origine une banlieue anglophone, où ils ont par trois fois dans la même rue, acheté, mis à terre et reconstruit leur maison! Celle-ci est très jolie, avec un jardin impeccable, dans une rue résidentielle superbe. Nous sommes en bordure du Lac St. Louis, soit un endroit sur le fleuve St. Laurent où les rives s’élargissent et où l’eau est plus calme. À trois pas du lac, leurs enfants embarquent leur canoë, se sauvent très souvent sur l’eau, nagent un peu plus loin des berges et vont jusqu’aux petites îles … cela fait rêver!
Marie-Paule est italienne par son papa et belge par sa maman, elle enseigne le français à l’Université Concordia et aussi à HEC, pour des mises à niveaux. Chaque faculté, chaque école ici à Montréal peut exiger un certain niveau de français et d’anglais pour obtenir son diplôme. Lorsque sa famille a émigré au Canada en 1951, elle était toute petite; elle est donc pure canadienne mais nos racines communes semblent quand même nous rapprocher, le courant passe immédiatement. Mokhtar est un personnage très drôle, positif, blagueur; il est originaire de Sidi Bou Saïd et vit à Montréal depuis quarante ans.
Ainsi notre année de voyages ne nous aura pas seulement enrichis de découvertes mais aussi de nombreux nouveaux amis fort chaleureux; une deuxième vie sera nécessaire pour entretenir ces relations d’amitié …