La pluie battait la fenêtre cette nuit mais le portier avait raison, il fait sec ce matin contrairement aux premières prévisions et déjà il faut refaire les valises.
C’est la Gay Pride Parade aujourd’hui, il y a de l’animation pour le rassemblement sur Copley Square ; les voitures de police contrôlent le quartier et bloquent certaines rues.
Nous avons réservé le lunch au restaurant panoramique qui se trouve dans Prudential Tower. Ainsi nous finissons notre séjour en beauté, au Top of the Hub, au cinquante-deuxième étage, attablés face à la Charles River et au MIT. En faisant le tour, nous reconnaissons les différents quartiers visités, sur un relief très plat jusque bien loin à l’horizon.
Le repas est excellent, la serveuse très agréable et je me demande toujours si les questions qu’elle nous pose oseraient surgir des serveurs chez nous. Ce n’est pas seulement d’où on vient mais pour quelle raison nous sommes à Boston et même si nous fêtons un événement particulier ce jour !
Le taxi se trouve un peu dans les bouchons vu l’animation dans la ville mais nous sommes bien à l’heure à l’aéroport Logan. Le service Air Canada est rapide et comme au départ, nous montons dans un petit Bombardier de cinquante places, bas de plafond ; une seule hôtesse pour nous servir boisson et chips sur moins d’une heure de vol … un vol comme on les aime, convivial.
L’objectif initial de cette journée de vendredi était une excursion en bateau jusque Provincetown, à la pointe nord de Cape Cod, ce bras de terre avec des plages idylliques, des ports de plaisance, une côte qui s’ouvre sur l’océan … une journée de rêve dont tout le monde nous a conseillé la destination. Mais c’était sans compter sur Andrea, cette tempête dont la queue nous apporte vent violent et pluie drue annoncés tout le jour. Et pourtant hier mon portier m’avait bien assuré le beau jusque milieu d’après-midi et quand je l’asticote ce matin, il répond : si le mauvais vient plus vite, il repartira plus vite aussi … pourvu qu’il ait raison ! Et de Cape Cod, nous nous contenterons du phare sur le paquet de chips.
Rester toute la journée dans l’hôtel ne me tente guère, je propose donc une sortie accessible en métro jusqu’à la Prudential Tower, et son centre commercial. Il compte seulement septante boutiques, soit dix fois moins qu’à Marina, ce qui décide Yves à me suivre et pour son bonheur le premier magasin est la librairie Barnes & Noble. J’y déniche un joli nouveau carnet de notes – je les remplis à vitesse grand V – et la présentation de leur liseuse nook, pas mal. Les enseignes qui retiennent notre attention sont Cheesecake Factory tellement alléchant, Microsoft avec un espace de vente qui fait penser à ceux de Apple et sa tablette Surface et un gigantesque salon de coiffure MIZU – il y en a également un à New York.
Nous restons ensuite bien calfeutrés dans notre hôtel Fairmont, un établissement datant de 1912, avec le cachet d’un petit château; son corridor et son hall aux lustres de cristal et aux plafonds dessinés dans des tons clairs, ses salles de réception éblouissantes – nous y verrons un mariage et un défilé de mode -, ses marbres et ses tapis, sa boîte aux lettres dorée, son Long Bar pour les repas dans un cadre de châtelain.
Mais je dois surtout parler de Catie Copley, l’ambassadrice canine que le Fairmont offre comme compagnie pour ses invités, un labrador noir adorable. Elle a quatorze ans, a été entraînée comme guide pour aveugle et quand sa vue a elle a baissé souffrant d’une légère cataracte, elle a changé de carrière; l’équipe de conciergerie de l’hôtel tient un agenda pour ses rendez-vous de balade. Un livre à la réception raconte aux enfants sa vie et elle possède sa carte de visite, on peut également lui envoyer un email … funny, isn’t it? Je ne prendrai pas le temps de la balader mais juste de discuter avec elle chaque fois que je rentre …
Le Fairmont est idéalement situé pour visiter la ville et malgré qu’il soit sur une place animée, nous l’avons trouvé très calme; les chambres sont capitonnées, les épaisses moquettes américaines couvrent les bruits de pas. Au dernier étage, un fitness avec une terrasse pour prendre le soleil avec la vue sur les immeubles et les toits du quartier mais il est clair que nous aurions pu aussi réserver au Harbor Hotel qui marie le charme historique et l’élégance moderne; un hôtel spectaculaire, avec un quai d’accostage qui donne l’impression d’entrer sous le porche avec son yacht … il est permis de rêver.
C’est bien le moment pour chatter avec nos jeunes; Thomas a fait son dernier jour à Zurich et est tout enthousiaste de commencer à Lausanne lundi, Mathieu regrette l’arrivée du beau temps avec son flux de pollens qui lui pourrissent la vie. Tous deux vont suivre ce week-end un cours de moto et Mélina qui était en formation cette semaine a beaucoup ri quand leur enseignant a annoncé qu’il allait parler de Business Model Generation, créé par un professeur de Lausanne!
Je me suis fait hier soir un itinéraire précis – avec les stations métro – et complet pour une série incroyable de choses à voir aujourd’hui. Une vraie journée ‘marathon’ et c’est d’ailleurs juste en face de l’hôtel que se trouve la ligne gravée sur le trottoir de cette course célèbre depuis 1897 – avec seulement quinze coureurs pour la première édition alors que de nos jours ils sont plus de vingt mille. Elle fut malheureusement cette année un lieu de tragédie, dont tout le monde ici parle encore; des fleurs, des chaussures, des peluches commémorent ce triste événement. Les professeurs que l’on rencontre et qui habitent sur le campus témoignent de ces jours effrayants à Cambridge, devenue ville fantôme, avec les rues désertes et seuls les bruits des sirènes et des coups de feu.
Copley Square – du nom d’un peintre portraitiste né à Boston en 1738 – est le cœur de Back Bay, anciennement un étang vaseux dont le niveau de l’eau dépendait des marées jusqu’au moment où Boston s’étend et où ce quartier est remblayé fin du dix-neuvième siècle pour devenir un quartier de résidence, de rues commerçantes aux façades de grès brun et aussi de beaux espaces verts. La place est dominée par la plus haute tour de la ville – soixante étages -, Hancock Tower toute en verre, dessinée en 1976, par l’architecte sino-américain I. Ming Pei – à qui l’on doit la pyramide du Louvre. Dans cet énorme miroir se reflète la Trinity Church, église anglicane de 1733. Sa façade en grès et granit est déjà spectaculaire en soi mais entrer dans cet édifice religieux inspire le respect, le calme. C’est l’artiste La Farge qui imagina cet intérieur très coloré, assez foncé; des motifs, des fresques et des dessins inspirés de l’église chrétienne, mais aussi un peu de byzantin, de motifs médiévaux et de la Renaissance. Les vitraux, extraordinaires, sont souvent l’œuvre d’artistes européens. L’église fut construite alors que le sol était encore mouvant, ainsi elle repose sur d’énormes pieux et un système de drainage fut mis en place.
L’autre bâtiment somptueux de la place est la bibliothèque municipale, avec une imposante façade, des escaliers la surélevant, et de part et d’autre de l’entrée une statue représentant l’Art et une autre la Science. L’intérieur est conçu comme un palais Renaissance, avec un majestueux escalier de marbre, des plafonds de mosaïques, des peintures murales et une paisible cour intérieure.
Le métro me débarque ensuite le long de Fort Point Channel, que j’enjambe pour voir de plus près le Children’s Museum, le meilleur terrain de jeux pour les petits et sur l’eau, le Boston Tea Party Ship qui permet aux visiteurs de revivre les événements de 1773, qui bloquèrent le port de Boston, début de la révolution américaine. Sur les quais où je me balade et admire de loin, les gratte-ciels du quartier financier et le magnifique édifice de verre de l’Intercontinental, une exposition particulière du Design Museum, appelée ‘Design is everywhere, so are we’, permet de prendre place sur des bancs publics originaux dont chacun est détaillé et expliqué sur un panneau et ceci tout le long du canal.
Cette partie de la ville semble en plein bouleversement; un grand palais des congrès et ses hôtels de luxe semblent avoir remplacé un ancien quartier de pêcheurs et d’artistes. C’est ici que se trouve aussi, en porte à faux de l’embouchure de ce bras d’eau, le ICA (Institute of Contemporary Art) à l’architecture novatrice et dont l’éclairage de nuit procure tout son effet. Derrière un contour de la promenade sur les quais, surgit un imposant bâtiment cylindrique, incurvé, de briques rouges et de verre qui abrite la Cour de Justice, face au fleuve.
Plusieurs grands espaces verts ont émergé dans la ville; une grosse route qui traversait jadis la ville a été enterrée et transformée ici en une chaîne de parcs et jardins, la Rose Kennedy Greenway. Entre l’eau et les buildings du quartier financier, je m’arrête pour humer, admirer les fleurs et la verdure; une jeune horticultrice discute deux mots et me donne le nom des roses rouges très en fleurs.
Le bâtiment des pompiers est spectaculaire, ainsi que bien d’autres hauts buildings dont certains sont un mix entre ancien et nouveau, tel le Exchange Building. Peu de façades avec des peintures comme à Montréal mais par contre, on retrouve toujours aux États-Unis les camions rutilants aux enseignes évocatrices.
La Custom House Tower, tour carrée avec sa grande horloge, abrite aujourd’hui le Marriott hôtel et elle me signifie que je suis proche de Quincy Market. Trois longs bâtiments à l’arrière du Faneuil Hall où passe le ‘Chemin de la Liberté’, sont un endroit pour le shopping – quelle bonne idée d’avoir emporté deux valises moitié vides – et la bonne table, un quartier piéton où s’en donnent aussi les artistes de rue. C’est ici que l’histoire de la ville a commencé il y a quatre siècles, et l’on ressent le mariage entre l’architecture coloniale qui jouxte dans le paysage élancé des gratte-ciels. Les quais accueillaient dans le temps des navires marchands, chargés de café, de thé, d’épices et ce sont maintenant des ferries et des bateaux de croisières pour passagers.
Le long de Union St., le Mémorial de l’Holocauste est original, avec un couloir de granit noir qui traverse six hautes structures de verre sur lesquelles sont gravés six millions de numéros ainsi que les témoignages de quelques survivants, un passage silencieux dédié au souvenir. Avant de reprendre le métro, j’observe ce massif gris du Boston City Hall, conçu par I. Ming Pei aussi mais qui est considéré ici comme un échec, sans espace vert, trop de béton.
Quelques stations plus loin, je débarque au nord de Charles Street, l’artère qui borde le quartier le plus prisé de la ville, Beacon Hill. Des rues étroites, vallonnées, des maisons et des trottoirs de brique rouge, des réverbères à gaz, des fleurs et de la verdure qui dégringolent des rebords des fenêtres, des boutiques chics et des antiquaires en font un endroit de flânerie tranquille, plein de charme. Et c’est à Louisburg Square, un jardin privé, une enclave pour les élites, que le prix de l’immobilier atteint des sommes folles … c’est magnifique.
Par une longue passerelle au-dessus des avenues, j’accède au parc qui suit les berges de Charles River Bassin,l’Esplanade, propice à la balade, aux pic-nics, aux siestes au soleil sur une estrade en bois tout en regardant les embarcations sur l’eau et en face le campus du MIT; des sentiers traversent les pelouses où se promènent les écureuils, des lapins, des oies, … des petits ponts, des étangs, des sculptures dont la tête en plaques d’acier de Arthur Fiedler, initiateur du parc et des concerts en plein air alors qu’il jouait dans l’orchestre symphonique. C’est pourquoi sur la grande plaine se trouve une scène très originale en forme de coquillage, en bois sur l’intérieur, où les concerts attirent tout l’été des centaines de milliers de spectateurs, notamment le 4 juillet pour la fête nationale et son feu d’artifice. Arthur Fiedler y a amené la tradition d’un concert du Boston Pop’s Orchestra, qui en 1929 se donna dans une scène temporaire en bois déjà en forme de coquillage.
Rentrant dans les rues de la ville, un attroupement devant Cheers, un pub rendu célèbre par une série télévisée qui connut un succès énorme entre 1982 et 1993 – beaucoup trop vieux pour nos garçons -, racontant la vie de ce bar de Boston et qui détient toujours le record d’audience (84 millions de spectateurs pour un épisode). Un deuxième bar Cheers a ouvert au marché Quincy et ils ont même inventé, semblable à la Freedom Trail, un Cheers Trail documenté, menant de l’un à l’autre.
Et je rentre progressivement vers Back Bay, en traversant Commonwealth Avenue Mall, non pas un centre commercial mais une allée harmonieuse de parcs, une artère de verdure où s’échelonnent des statues. Un U-Turn et la ligne droite de Newbury St., longue de deux kilomètres, bordée d’arbres, de jolies boutiques, de terrasses me fait découvrir un petit magasin regorgeant de bonbons, irrésistible. J’aime également ces vitrines extérieures, présentant des vêtements dans les cours devant l’entrée de la boutique ou ces sièges en forme de main manucurée pour signaler un Nail Beauty.
Le timing est parfait, nous nous retrouvons à l’hôtel vers 16 heures; Yves, après avoir rencontré un collègue de Babson College s’est dirigé vers Harvard pour se plonger dans l’ambiance et travailler à son aise, dans une librairie ou un café. Et c’est ensemble que nous partons vers le sud-ouest, en direction du Musée des Arts, agrandi il y a peu d’une aile moderne mais c’est un autre musée qui nous tente ce soir, le Isabella Steward Gardner Museum. Cette riche dame bostonienne, collectionneuse d’art et globe-trotteur pour acheter des œuvres, fit construire ce palais de pur style vénitien, sur trois étages pour y exposer ses quelques deux mille pièces. Elle fonde le musée en 1903 et y présente sa collection de peintures, de sculptures, d’objets d’art décoratif dans des pièces ouvrant sur une superbe cour intérieure plantée de fleurs et de plantes. Sa collection comprend des Rembrandt, Titien, Boticelli, Vermeer … certains tableaux ont été volés en 1990 et jamais retrouvés, est-ce pour cela que les gardiens sont si nombreux et que toute photo est interdite. En 2012, Renzo Piano conçoit une nouvelle aile, toute moderne celle-ci, aérée avec un salon, un restaurant, un jardin et sur la façade un portait d’un homme africain, imprimé sur un maillage, réalisé par Adam Pendleton, un artiste noir américain connu, ayant déjà exposé au MoMA et au Tate. Cette façade change tous les six mois, invitant des artistes à créer une œuvre pour cet endroit précis.
Nous remontons à pied vers notre Square, en traversant un jardin public – anciennement un marais – qui fait partie de Boston Emerald Necklace; ce ruban vert qui s’étire sur onze kilomètres à travers la ville a été conçu par Frederick Law Olmstead, le créateur de Central Park à New York. Cette partie, appelée Back Bay Fens est sauvage et nous plait, tout comme la magnifique roseraie qui rayonne de couleurs et de parfums.
Ce coin renferme de nombreuses Universités et écoles supérieures, il est animé par les étudiants dans les nombreux bars et bistrots; le Berklee College of Music est une des meilleures des États-Unis, nous traversons son quartier et je peux dire en tout cas que c’est vaste.
Ayant déjà pas mal sillonné la ville, mon impression est vraiment très agréable; Boston présente de nombreux espaces verts super bien aménagés, la ville est vraiment nette et propre en son centre touristique, peu de travaux et de chantiers, nettement moins de personnes qui demandent l’aumône que dans d’autres métropoles, beaucoup de façades rouges, quelques escaliers extérieurs par-ci par-là, de jolies façades de cuivre pour des loggias d’appartements bien situés.
Une journée riche en découvertes, qui se termine autour d’un bon repas – homard pour moi évidemment – en compagnie d’Olivier, un jeune professeur de Liège qui parvient à passer plusieurs mois par année ici à l’université Bentley de Boston pour y faire de la recherche.
Yves avait un contact pour donner une conférence au MIT à 16 heures aujourd’hui mais hier soir, un mail lui apprend qu’il aura un bureau à disposition dès le matin et est joint un horaire de rendez-vous, d’heure en heure avec des chercheurs, des professeurs. Il part ainsi pour une longue journée à la Sloan School du MIT. C’est à Cambridge, de l’autre côté de la Charles River qu’ont élu domicile les deux plus prestigieuses universités au monde. Harvard est fondée en 1636, avec la faculté de théologie et est la plus ancienne école d’enseignement supérieur du pays. Le MIT est un peu moins bourgeois, il a débuté avec des facultés de sciences et de technologies en 1861, fondé par William Barton Rogers.
Voilà ainsi une belle destination pour moi également aujourd’hui. Je vise d’abord Harvard que je rejoins par le métro. Le métro ici à Boston est quelque peu particulier, il ressemble plutôt à un train souterrain, qui nous balade avec bruit dans les catacombes de la ville. Les wagons sont assez anciens, souvent avec quelques marches d’escaliers, il est possible de discuter avec le conducteur. Les voitures s’ouvrent parfois des deux côtés, il s’agit de faire le bon choix selon la sortie ou la correspondance que l’on veut prendre. Et même à la rue, il faut connaître sa direction pour emprunter le bon escalier; par contre de nombreuses stations sont accessibles pour les handicapés avec des ascenseurs. Tout comme la ville, le métro est propre, il y a des poubelles spéciales pour récolter les journaux gratuits lus – belle invention – et j’ai même eu droit à un petit concert sur des tuyaux dans les bas-fonds d’une station.
Harvard Square est très animé, coloré et met dans l’ambiance de la jeunesse. Le campus est étendu mais je commence par la mythique Harvard Yard; c’est comme dans les films … un parc bien vert et feuillu, autour duquel s’alignent des édifices historiques de briques rouges et colonnes blanches, la statue prisée par les étudiants de John Harvard et sa chaussure porte-bonheur. La Memorial Church et la gigantesque bibliothèque Widener aux quelques huitante kilomètres d’étagères – mais dont l’accès n’est pas autorisé au public. Une sculpture du célèbre britannique Henry Moore se trouve près de la bibliothèque, je le reconnais de suite après ma visite à l’AGO de Toronto et j’en reverrai une autre également au MIT.
Le parc est entouré de clôtures aux ferronneries travaillées et en pourtour je découvre les facultés de droit, des sciences et aussi telle une église, le Memorial Hall qui renferme une grande salle de spectacle. Trois musées d’art de Harvard sont actuellement en travaux extérieurs, pour être réunis en un seul complexe et c’est Renzo Piano qui orchestre ce grand projet. Sur cette même rue Quincy, le Carpenter Center abrite une école d’arts plastiques, c’est le seul édifice de Le Corbusier aux États-Unis. Je ne passe pas l’eau pour voir la Harvard Business School car l’heure a tellement vite passé et je me suis attardée dans les boutiques de livres et souvenirs.
Le MIT a ouvert le monde vers les technologies, c’est dans un laboratoire ici qu’est né en 1928 le premier ordinateur et c’est grâce aux travaux d’un informaticien du MIT qu’a été créé Internet. Le style des bâtiments et leur architecture sont tout autres que sur Harvard, avec moins d’unité. L’édifice qui attire le plus le regard est bien évidemment celui de Frank Gehry, le Ray and Maria Stata Center; une construction un peu folle, où se mêlent en façade la brique, le verre, le métal dans des formes aux antipodes des conventions d’architecture habituelles.
Le bâtiment principal de cette université est une construction gigantesque, un énorme monolithe gris, aux hautes colonnes, un dôme discret, regardant la Charles River où des voiles rouges briques au logo MIT se laissent porter par le vent. Alors qu’à Harvard, les cérémonies de remises de diplômes ont déjà eu lieu, ici elles se préparent avec l’alignement de centaines de chaises dans la plaine et les essais de musique; et voici pourquoi nous ne trouvions pas de place dans les hôtels de Cambridge. Je pénètre incognito dans le hall du bâtiment, impressionnant et je m’enfile dans les corridors à perte de vue, laissant voir quelques labos de physique, chimie. Sur le retour vers le métro, il y a des constructions plus modernes comme le centre Novartis ou le centre de recherche sur le cerveau. Il me faut quitter cet endroit magique pour les étudiants et rentrer vers la ville.
C’est dans le South-End, proche du Centre pour les Arts que nous dénichons un bistrot bohème et chaleureux, réputé pour son club de jazz, où la soirée sera délicieuse, dans l’assiette et les oreilles, le Beehive sur Tremont.
Le taxi commandé hier chez Diamond se présente pile à l’heure à 7h15 et nous n’oublions pas de lui demander un reçu cette fois-ci. En une vingtaine de minutes nous sommes à l’aéroport, l’enregistrement, le contrôle de sécurité se passent sans aucune file d’attente, le hall est vaste et désert, le personnel est vraiment très agréable à chaque poste et ce n’est pas moins de dix fois que notre carte d’embarquement est scannée. C’est à la douane américaine, que l’on passe par chance ici à Montréal, que nous nous attendions à des questions insistantes … eh bien non, que du contraire, le douanier est souriant, sympathique et nous souhaite un très bon séjour aux US. Martine en conclura qu’il doit être content de vivre au Québec. Il nous reste ainsi plus de deux heures pour un copieux petit-déjeuner et du travail de messagerie pour Yves tandis que je bouquine mes guides sur Boston.
La vue à l’atterrissage est superbe sur la baie mythique de Boston, avec quantité incroyable de voiliers et des îles éparses. Munis d’un pass pour les transports en commun, le trajet vers l’hôtel se déroule aisément et nous découvrons Copley Square, magnifique et animée ce jour d’un marché dit ‘familial’. En attendant que notre chambre soit prête, un lunch sur Newbury St. nous met de suite dans l’atmosphère d’une ville à l’ambiance joyeuse, aux terrasses bondées, aux bars où la musique fait vibrer.
Boston est dite la ville la plus européenne d’Amérique du Nord, elle compte aujourd’hui un peu plus de six-cent-mille habitants mais deux millions de visiteurs par an; elle est la capitale du Massachusetts et plusieurs quartiers font penser à l’Angleterre. Les premiers arrivants venaient en effet de Grande-Bretagne mais ont suivi des vagues d’immigration d’Irlande, d’Italie et plus récemment d’Asie, ce qui en fait une ville très cosmopolite.
C’est en 1620, à bord du Mayflower, que débarquent les premiers immigrants issus d’une secte presbytérienne puritaine qui fuyait les persécutions religieuses de leur pays et ils fondent la petite colonie de ce qui deviendra Boston, une dizaine d’années plus tard avec John Winthrop, le premier gouverneur du Massachusetts. Les colons veulent une société chrétienne et où l’éducation tient une place importante; en 1636, Harvard College voit le jour pour former les pasteurs de la colonie.
La capitale prend aussi le surnom de ‘berceau de la liberté‘ car c’est ici qu’ont démarré les manifestations contre le prélèvement de taxes dans les colonies exigées par l’Angleterre. Celle-ci face aux rebelles autorise alors les compagnies de l’Inde de vendre leur thé et c’est la révolte, le conflit avec les anglais et finalement les anglais quitteront Boston en mars 1776, quatre mois avant la proclamation d’indépendance des États-Unis. La ville se développe rapidement au niveau commercial, industriel et culturel; les musées, les salles d’opéra et de concerts, les librairies en sont le témoin encore aujourd’hui.
J’entraîne Yves à la découverte de l’histoire de la ville par le Freedom Trail, un parcours piéton de quatre kilomètres, tracé d’une ligne rouge sur les trottoirs, qui se réfère – via seize sites – aux événements, lieux et personnages importants de la guerre d’indépendance des États-Unis. Le parcours débute dans un grand parc public, magnifique, avec des massifs déjà bien fleuris, des gazons superbes, des arbres géants, des étangs où l’eau ici ne fait pas défaut. Ma prise de photos ralentit un peu de rythme de Yves, nous avons une petite brochure qui nous détaille chacun des sites et nous admirons ainsi le nouveau bâtiment du Gouvernement avec son Dôme recouvert de feuilles d’or, des églises de briques rouges au clocher élancé tout blanc, de petits cimetières épargnés dans les ruelles, un des importants salons littéraires du dix-neuvième siècle, le Hall Faneuil – lieu historique de la révolte des colons, la plus ancienne demeure coloniale en bardeaux du centre, celle de Paul Revere, un patriote qui a joué un rôle important au moment de l’attaque des anglais.
Nous enjambons la Charles River pour atteindre Charleston, un très joli quartier, paisible qui clôture le parcours avec un obélisque de granit, le Bunker Hill Monument. Il commémore sur une colline la première grande bataille sanglante de la révolution américaine; c’est sans doute une petite chance pour moi que l’entrée en soit déjà fermée en cette fin d’après-midi – il ne doit pas y avoir d’ascenseur pour en atteindre le sommet mais bien quelques trois cents marches. Charleston était autrefois un quartier ouvrier, de par son chantier naval. A quai, le USS Constitution Old Ironsides – dont l’équipage avait cru ses flancs en acier quand un boulet de canon avait rebondi dessus – construit fin du dix-huitième siècle, c’est le plus vieux navire en service de la marine américaine, il sort à quelques reprises sur l’année pour des croisières dans le port.
Vite, vite, me crie Yves … une navette fluviale est sur le départ pour nous ramener sur l’autre rive près de l’Aquarium, une petite traversée de rêve pour nous offrir une jolie vue sur la ville et le fleuve. Le quartier nous tente pour un repas en terrasse du Tia’s et nous nous lançons dans l’éclatement d’un homard entier pour en savourer sa chair délicieuse, armés de pinces, aiguilles, d’un bavoir et je me désaltère d’une bonne bière locale, une Samuel Adams. C’est succulent, une spécialité de Boston; je ne m’en priverai pas tout au long du séjour, sous différentes présentations – le Lobster Roll est aussi un régal. Le retour à pied le long du fleuve, sur le parcours de HarborWalk, et ensuite en traversant le quartier financier pour rejoindre notre douce chambre d’hôtel permet de repérer les balades des prochains jours.