Direction Labrador Park avec le métro et depuis la station, sur recommandation de Béat, j’emprunte le chemin qui longe le canal; ce n’est pas un sentier comme on peut se l’imaginer chez nous mais un ponton en bois qui est plus rassurant. Je me retrouve très vite en pleine nature, nature bruyante de cicadas, ces insectes qui doivent régner ici par milliers. L’eau semble très basse et remuée de terre, de couleur brun orangé, sans doute à cause de la sécheresse de ces dernières semaines. Les racines des arbres sont largement visibles, avec des formes sculpturales.
Alors que j’arrive à la mer, mon intention est de partir vers la gauche mais des musiques de fête m’attirent dans l’autre direction. Il s’agit d’un mariage, probablement indonésien, dont j’admire les costumes des mariés. Famille, amis, communauté nombreuse sont assemblés pour passer la journée à fêter sous des tentes superbement décorées; les buffets sont alléchants … miam cela sent bon mais je ne suis pas assez hardie pour nouer le contact et je continue encore un peu mon chemin.
Des pêcheurs sont installés avec leurs lignes ou leurs cages pour la prise du jour; j’observe un homme manipuler aisément des crabes qu’il serre avec des élastiques. Je me trouve au passage étroit entre Sentosa, anciennement Pulau Belakang Mati en malais et l’île principale; Sentosa servait de barrière naturelle pour protéger le port de Singapour. Les Forts Siloso et Labrador cernaient ce passage; on aperçoit encore ici des bunkers dans la forêt, un poste de garde et de tir que l’histoire a oublié.
Un rocher de granit, appelé Dragon’s Teeth, rappelle les deux rochers qui de part et d’autre du passage servaient de points de repaire aux navigateurs pour accéder au port de Keppel. Les britanniques ayant ouvert la voie d’accès, les rochers furent détruits et ceci est une copie datant d’une dizaine d’années.
La musique m’accompagne encore un bon moment alors que je poursuis ma balade justement vers Keppel et Harbour Front. En préparant cette découverte, j’ai trouvé étrange que le chemin soit tracé sur l’eau mais il s’agit bien de mon ponton qui surplombe la mer; c’est beau, le vent du large est bienvenu. Mon regard est attiré par des immeubles qui se dressent ici et que nous avions repérés l’an dernier depuis Hort Park. Leur forme est intrigante, la pointe est courbée, des passerelles font des liaisons. C’est l’œuvre du célèbre architecte Daniel Libeskind! La nouvelle entrée en forme de cristal du Royal Museum of Ontario à Toronto nous avait déjà fascinée. Il a également été retenu pour le One World Trade Center à New York. Je suis ravie de pouvoir admirer ces tours depuis leur pied; elles s’insèrent dans un magnifique complexe de logements luxueux près de la Marina de Keppel (on pourrait loger tout Lonay dans cet endroit!).
Woah, quel bonheur ce doit être d’habiter ici; des canaux bordés de palmiers, de bougainvillées ont été créés pour que chacun ait l’impression d’avoir pied sur la mer. À Singapour il semble vraiment que les architectes puissent se faire plaisir, créer des formes, des structures extraordinaires. Le cadre me fait un peu penser à Monaco mais le luxe ici est encore supérieur. Je me sens en vacances, en regardant un superbe yacht rentrer dans la Marina et ensuite j’emprunte le pont suspendu qui relie la petite île de Keppel. C’est en 1819 que les britanniques estiment les eaux assez profondes ici à Keppel pour y créer un premier port et jusqu’en l’an 2000, c’était encore un chantier naval qui occupait l’espace.
Depuis l’île la vue est belle sur le mont Faber et l’arrivée du téléphérique, sur Harbour Front où accostent les gros paquebots de croisière et sur la rive nord de Sentosa. J’ai lu que les restaurants de Keppel Island sont prisés – je me promets d’y revenir avec Yves un soir. Il y a encore beaucoup de grues pour de futures constructions; à Singapour les chantiers n’en finissent pas. Le retour en bus est direct, un peu plus long mais cela permet de revoir les différents quartiers et aussi de profiter d’un peu de repos.
Soirée mexicaine à Dempsey Hill où les fajitas sont excellentes et la musique envoûtante. Dempsey Hill est aussi connu pour ses galeries; l’une d’elles expose la collection Pierre Argillet de dessins de Salvator Dali. Christine Argillet, la fille, ouvre en effet au public ces magnifiques œuvres et nous aimons particulièrement deux tapisseries très fines et lumineuses.