Ce serait regrettable de quitter la capitale sans être allée vers le palais impérial. Celui-ci est bien caché au milieu d’un grand parc en plein centre de Tokyo, cerné par des remparts du 16ième siècle et des douves ; il n’ouvre ses portes au public qu’une ou deux fois par an. En 1868, l’empereur Meiji transféra la capitale de Kyoto à Tokyo et il établit la résidence impériale sur le site de l’ancien palais des shoguns Tokugawa, appelé le château d’Edo. Aujourd’hui tous les touristes convergent vers l’élégant pont en pierre à deux arches, le Nijubashi, devant l’entrée principale. Les 5 km qui forment le pourtour du domaine sont le site préféré des joggers de la ville, j’en verrai à tout moment sur mon chemin. La place dite de l’Imperial Palace est de toute beauté avec son parc au sol d’un gazon parfait, coupé au couteau, tel un tapis de velours vert tendre et ses superbes pins et cyprès taillés en plateaux, minutieusement.
Attenant au palais, Higashi gyoen, le jardin de l’est, de 20 hectares est lui accessible au public ; on y accède par une grande porte et un chemin qui grimpe entouré de murs d’énormes pierres, avant d’atteindre le plateau sur lequel était érigé le grand donjon du château d’Edo. Des variétés de fleurs, de plantes et d’arbres agrémentent ce magnifique jardin, offrant en chaque saison aux visiteurs une balade agréable ; aujourd’hui des abricots, des roses et des bambous costauds retiennent mon attention.
Le temps me presse et je me dirige vers le Kitanomaru Park qui offre lui déjà de jolies couleurs d’automne sur certains de ses arbres ; outre un étang aux contours sauvages et arborisés, il abrite des musées comme le Musée National d’Art Moderne et le Musée des Sciences avec sa façade blanche composée d’étoiles. A l’autre extrémité, le Nippon Budokan Hall est une énorme construction, de style traditionnel japonais, qui date des jeux olympiques de 1964 pour les compétitions de judo et arts martiaux; aujourd’hui il est utilisé pour des manifestations sportives, culturelles ou musicales … les Beatles s’y sont produits en 1966 et on semble y attendre un groupe d’idoles ce soir !
Autour de la Crafts Gallery, bâtiment en briques rouges anciennement quartier général de la garde impériale, j’entends et j’observe une certaine effervescence quand soudain un garde m’accoste et m’accompagne pour me placer en toute belle place afin de voir sortir le couple impérial du palais. Waouh, quelle chance … cela s’appelle, être au bon endroit au bon moment ! Moment émouvant quand l’impératrice baisse sa vitre pour saluer les quelques personnes qui se trouvent avec moi. C’est pour eux aussi la première fois qu’ils la voient et ils en sont tout émotionnés ; une jeune fille a remarqué que je filmais, elle me donne son adresse email pour que je veuille bien lui envoyer la vidéo. J’en suis moi même ‘toute chose’. Il était 14 heures précises quand la circulation a été stoppée pour laisser passer la voiture impériale.
Le parc Chidorigafuchi est semble-t-il merveilleux à la saison des cerisiers en fleurs mais la balade est belle, surplombant les douves et le fossé où l’on peut louer des barques pour y naviguer. Ayant bien profité, malgré un temps un peu gris, de mon exploration du domaine impérial – avec en sus une belle cerise sur mon gâteau – je reprends la direction de l’hôtel.
Yves a une fois de plus été très bien accueilli à Tokyo Institue of Technology ; les étudiants ne le lâchaient pas de leurs questions après son exposé. Et l’heure est arrivée de quitter la capitale pour prendre un de ces trains grande vitesse, le Shinkansen qui nous emmène à Kyoto. Un corps de balai vient s’aligner sur le quai, 3-4 personnes en uniforme rose et en ligne comme à l’armée, devant chaque wagon … une organisation impressionnante, sur quelques minutes le train est entièrement nettoyé et bien sûr, les sièges retournés !
Le train présente le confort de nos TGV, avec toutefois plus de place pour les jambes ; avec le JR Pass et nos réservations de sièges faites en arrivant vendredi, nous sommes en ordre pour ce voyage. J’ai simplement un petit doute en remarquant que l’année est ’24’ et non 2012 … au Japon, il y a deux manières de compter les années, soit comme nous la connaissons, soit en comptant les années à chaque changement de règne de l’empereur. Ainsi c’est la 24ième année du règne de l’empereur Akihito. Nous quittons Tokyo et passons par Yokohama avant de nous éloigner vers l’ouest. Le paysage défile avec ses habitations dans les rues encombrées de poteaux d’électricité, le soleil faiblit, le ciel rougit et au loin les montagnes se font voir … le Mont Fuji est toujours bien reconnaissable. Il fait tout calme, les japonais sont très discrets de nature ; que ce soit dans le train, le métro, l’ascenseur et souvent même dans les restaurants, répondre au téléphone portable ne se fait pas et ils chuchotent entre eux ou même ne se parlent pas – nous étions quinze dans l’ascenseur qui nous montait dimanche au 45ième de la Mairie et on entendait les mouches voler ! C’en est presque inquiétant parfois…
En moins de trois heures, que j’ai passées à potasser ma documentation sur notre nouvelle destination, nous atteignons Kyoto et sa gare phénoménale que nous découvrirons en détail plus tard. Kyoto a été la capitale du Japon pendant plus d’un millier d’années et a conservé des trésors inestimables, peu touchés par les aléas du temps. Les bombardements auraient miraculeusement épargné la ville lors de la seconde guerre, juste grâce à la volonté d’un haut responsable américain, sans doute émerveillé par la splendeur des monuments qu’elle renferme.
Nous sommes vite mis au parfum à l’Office de Tourisme de la gare : la communication en anglais sera plus difficile que dans Tokyo. La gentillesse et l’envie d’aider compenseront le manque de langage parlé … l’employé nous remet un plan de la ville et des cartes pour les bus et métro, sans que nous ne soyons très certains de leur utilisation exacte. Le taximan nous amène sans souci à notre hôtel, avec toujours la petite carte que j’ai préparée portant les coordonnées en japonais (le gps fonctionne avec le numéro de téléphone, vraiment efficace). Yves a réservé nos quatre nuits dans un appart-hôtel (Citadines) qui est parfait et bien localisé ; l’entrée et le lobby font penser à un petit jardin et salon japonais et le personnel ici est largement bilingue.
Nous leur demandons un conseil pour le premier souper, la proposition s’avère excellente. Le Kobe Misono nous séduit : une pièce de bœuf grillée devant nos yeux, accompagnée de copeaux d’ail doux et de légumes ; la viande fond littéralement dans la bouche et nous savourons ce repas, dans un petit coin du restaurant, avec un cuisinier très sympathique, tout en dégustant pour la première fois un vin rouge japonais. Le souci du service est toujours aussi présent ; un petit bac pour poser mon sac, des cintres juste derrière nous pour les vestes, des serviettes humides avant de commencer le repas, les verres qui ne restent jamais vides et avec un sourire toujours sur les lèvres. Le restaurant se trouve dans une des grandes avenues commerçantes de Kyoto, avenues qui sur des kilomètres sont animées jour et nuit, avec des enseignes lumineuses dont nous en reconnaissons la plupart maintenant. Les trottoirs sont assez larges et couverts sur toutes les longueurs d’un immense toit blanc qui protège du soleil et de la pluie. Nous rentrons à pied à l’hôtel, sans faire fausse route … Tadashi, notre guide nous confirme sa présence samedi à 9 heures, c’est parfait.



16 décembre 2012 à 01:55
Les photos sont très belles, surtout celle des cérisiers en fleurs! un grand merci à vous !