Yves est accompagné par Karen ce matin pour aller tout d’abord donner un cours dans la nouvelle Business School de New Huadu, avant de rejoindre le bureau d’édition de la version chinoise du livre, avec au programme interview et photos. La journée sera enrichissante des deux côtés et il rentre le soir avec une liasse de cartes de visites et de nombreux cadeaux.
C’est Lisa, une jeune chinoise, charmante – qui a étudié le français à Nice et Paris pendant six années – qui m’accompagne toute la journée pour découvrir encore des merveilles de Pékin. Le froid est toujours au programme – j’ai ajouté une couche de vêtements et je porte un bonnet acheté hier – et le soleil se cache derrière une brume tenace. Elle est de petite taille, très douce, n’est pas très encline à prendre le métro et je dois dire que mon expérience d’hier soir à l’heure de pointe n’est pas non plus pour m’encourager. Nous prenons donc un taxi et elle s’inquiète pour savoir si je suis assez habillée.
Tian Tan est notre première destination; le Temple du Ciel fut construit à la même époque et par le même architecte que la Cité Interdite, sous le règle de l’empereur Jongle de la dynastie des Mings au début du quinzième siècle. Le parc dans lequel il se situe est très vaste et le complexe composé de plusieurs bâtiments taoïstes serait un des plus vaste de Chine. L’empereur venait s’y recueillir, faire des sacrifices, vénérer le ciel et aussi ses ancêtres pour assurer le bonheur de son peuple. Il implorait les dieux pour qu’ils les épargnent des démons du ciel et leur assurent ainsi de bonnes récoltes. L’allée principale, toujours dans l’axe nord-sud est pavée de dalles plus claires; elle était réservée aux dieux, les empereurs se déplaçaient juste sur ses bordures.
Ce qui est très agréable de nos jours, c’est l’ambiance dansante et chantante qui règne dans les parcs; à l’époque impériale le peuple n’était pas autorisé dans l’enceinte mais ici c’est tout différent. Des gens se rassemblent pour pratiquer du Tai chi, du Yoga, danser sur le son de la musique qui sort des petits transistors qu’ils ont amenés, d’autres jouent à se lancer un volant avec le pied ou jouer au badminton avec un petite balle, des hommes jouent aux cartes tandis que des femmes crochètent ou tricotent, un monsieur dessine de jolis messages en calligraphie éphémère et une dame seule fait elle danser au son de sa mélodie un grand ruban sur un bâton. Il y a également des amateurs du chant, orchestré par un animateur et accompagné d’instruments … ils chantent un chant traditionnel militaire, me dit Lisa. Emmitouflés dans leurs grosses doudounes, ils semblent s’amuser et invitent volontiers les badauds à se joindre à eux; je les trouve déjà nombreux et pourtant nous sommes en hiver et je peux bien imaginer qu’une température plus clémente en attire encore plus. C’est fantastique, cette habitude de se rassembler pour faire une activité physique dans un parc, de manière spontanée.
Mais nous sommes ici pour visiter cet ensemble prestigieux, dont je suis sous le charme. Tout d’abord nous gravissons les marches de marbre qui mènent à l’autel rond aux trois cercles concentriques, où en son centre l’empereur présentait ses sacrifices; l’autel est entouré de deux enceintes, la ronde représenterait le ciel, la carré la terre. Le temple circulaire ensuite est superbe; le soleil étincelle sur son toit recouvert de tuiles de céramique bleue, couleur du ciel. La croyance en les ancêtres était forte et c’est ici que l’empereur se rendait pour les vénérer. Et ce temple de dévotion aux dieux et aux ancêtres est entouré d’un haut mur circulaire produisant un écho formidable. Nous traversons des ponts surplombant les jardins aux pins parfois âgés de plusieurs centaines d’années, regardant de ci de là des chinois qui dansent ou chantent … nous passons une nouvelle porte aux trois arches, celle de l’est pour l’empereur, de l’ouest pour les officiels et celle du centre pour les dieux.





Le dernier temple rond, Qi Nian Dian, semblable par sa forme au premier mais sur trois étages, est celui où l’empereur venait prier pour de bonnes récoltes, une architecture remarquable, probablement une des plus photographiée et représentative de la Chine. Sous ces trois toitures remarquables, le soleil rayonne sur les dragons et les phénix dorés, qui représentent l’empereur et l’impératrice ainsi que sur ce rouge impérial qui recouvre la corolle du bas. On s’approche en montant les marches de marbre et en levant la tête, j’admire cette splendide voûte circulaire, construite entièrement en bois, sans un seul clou, structurée et recouverte de peintures telles des faïences. Les différents toits sont supportés par des poteaux de bois rouge décorés tout en finesse … une merveille!





Nous sortons par un long passage couvert, en zig-zag où nous sommes un peu accostées par des vendeurs de cartes, de foulards et de souvenirs mais c’est aussi un lieu de rencontre pour des Pékinois qui jouent, dansent ou discutent.

Nous passons l’après-midi toutes les deux dans le Palais d’été, Yihe Yuan et là aussi, c’est juste ‘Woah la grandeur’! C’est au dix-huitième siècle, sous la dynastie des Qings, qu’il prend la taille et la forme encore visibles aujourd’hui. Un peu éloigné de la ville, avec un parc immense, cette résidence d’été permettait à la famille impériale de venir prendre un peu de fraîcheur et de nos jours, cela reste une visite fort appréciée des touristes par fortes chaleurs. Il s’étend sur 290 hectares, avec des lacs sur lesquels à la bonne saison s’épanouissent des milliers de fleurs de lotus et où des barques promènent les touristes; à pied il faut au moins deux heures de marche pour en faire le tour et à un des pontons est accosté un superbe bateau dragon en bois peint en blanc, donnant l’impression d’un bateau de marbre. Il faudrait bien plus de temps pour explorer ce parc, qui compterait trois mille bâtiments; une multitude de palais, temples, sanctuaires, pavillons, musées se cachent dans ce décor de jardins, de pierres, de bronzes, d’arbres centenaires superbement entretenus.









Comme je l’ai plusieurs fois entendu ici à Pekin, une colline artificielle a été construite avec les terres creusées des lacs; c’est la Colline de la Longévité, où le Pavillon des Fragrances de Bouddha domine superbement le parc. Pour y grimper nous longeons d’abord le lac par un corridor de bois magnifique … le plus long au monde, sur 720 mètres de long, avec par milliers, de splendides peintures sur les poutres, représentant des scènes, des messages, des allégories. Le chemin serpente ensuite entre les pins, les rochers pour atteindre le Pavillon et derrière lui, le Temple of the Sea of Wisdom, de forme carrée, aux murs recouverts de céramiques vertes et jaunes où des logettes contiennent des centaines de petits Bouddhas.










Les temples sur la descente vers le nord du parc, sont de style tibétain, superbes, avec des toits jaunes, couleur typique des toits sous l’empire Qing et des pignons rouges aux inscriptions dorées. Cet endroit me plait énormément par son cadre très ‘nature’ et par la diversité et la richesse des temples, des pavillons, des palais … c’est tellement impressionnant.







Sur le chemin du retour, sous la lumière tamisée du soleil qui se couche, Lisa me propose une halte au Nest, le stade national de Pékin, qui fut la principale structure des Jeux Olympiques d’été 2008, conçu par le bureau suisse Herzog et de Meuron et qui peut contenir nonante mille spectateurs. Le quartier est ici tout moderne, le Nid est superbement mis en évidence près d’une esplanade gigantesque, quasi vide aujourd’hui. En face, tout à fait original et monumental, l’hôtel Pangu, sept étoiles, en forme de dragon a reçu les plus importantes personnalités du monde; on doit sa forme à l’architecte qui a réalisé la tour de cent et un étages à Taipei. Ces trois jours passés à visiter les sites importants de Beijing me laissent une impression de gigantisme, de richesse historique, de beauté architecturale, de couleurs, de musique, de saveurs, de diversités, de contrastes, …



