Le séjour à Kyoto approche, il est temps de préparer les documents de voyage et les visites que j’aimerais faire – je sens déjà que mes aspirations ne pourront pas toutes être réalisées. Cela me rassure d’avoir des papiers et j’ai encore un peu de peine à trouver l’enchaînement exact des icônes kanjis sur la photocopieuse – il faut absolument que je retienne : d’abord le vert et ensuite le rose foncé!
Je me sens toutefois de plus en plus à l’aise avec le langage des mains, j’emmène Yves manger des Tempuras dans un minuscule restaurant où ni anglais ni photos ne pourront nous aider – un vrai régal … heureusement que nous ne sommes pas filmés au moment de la prise de commande ! Ce restaurant, où Shizue m’avait invitée il y a deux ans, est proche du Sanctuaire Tenmangu, fréquenté surtout par les étudiants, soit en prévision des examens, soit pour remercier pour la réussite ou alors avec l’espoir de mieux faire la prochaine fois. En descendant la bute, mon intention est de saluer Shizue (lui faire part de notre exploit pour le lunch); elle doit être occupée avec les travaux de remplacement de l’ascenseur dans l’immeuble de son bureau. En effet elle m’avait annoncé ces gros travaux, qui vont s’étaler sur trois semaines – chance que ce ne soit pas dans notre building, nous qui occupons toujours un appartement au 7ème étage.
C’est le premier jour de ciel bleu depuis notre arrivée, je ne peux me priver d’une balade autour du Palais Impérial – lieu fétiche pour Hanami. Comment rester insensible à la beauté des cerisiers qui bordent le chemin par delà les douves protégeant le palais ? Nous sommes nombreux et pourtant la foule est calme, disciplinée et considérée comme visiteur de Hanimi et non visiteur de Tokyo. Je suis touchée d’observer les japonais qui s’émerveillent – que de photos… toujours cette envie d’en prendre encore et encore … comme pour avoir la certitude d’encrer ces moments magiques pour longtemps en nous. Le vent fait déjà virevolter les pétales délicates qui nous enveloppent comme des confettis parfumés, avant de former un tapis sur les chemins. La pleine floraison sent la fin, les jeunes feuilles vert tendre apparaissent et il en va de même pour les érables qui renaissent à la vie en ce printemps. J’apprendrai vendredi par Tadashi que Sakura s’étale sur quatre phases : d’abord ce sont les prunus qui vont fleurir et ce sont les seuls qui porteront des fruits (j’en ai vu au sanctuaire ce matin), ensuite les cerisiers à fleurs de cinq pétales puis les cerisiers pleureurs et enfin ceux aux fleurs de huit pétales, comme des petits pompons.
Le soir tombe, la lumière apporte encore un peu plus de féerie à la scène, un éclat particulier aux délicates fleurs. C’est l’heure de sortie des bureaux, les joggeurs commencent leur boucle tout autour du palais tandis que je rejoins Yves, Noboru et Kumi pour un menu Kaeseki, cuisine de la région de Kanazawa dans le restaurant Chinju. Nous sommes au septième étage de l’hôtel Marunouchi avec une vue plongeante sur la gare centrale de Tokyo, gare qui fut récemment rénovée et rétablie à sa plus juste image de celle d’Amsterdam. Nous passons une soirée tellement agréable avec nos amis, et le service assuré par des dames de grande classe vêtues de kimonos est discret et attentionné. Le décor des plats de dégustation qui se succèdent ne cessent de nous éblouir par leur finesse, leurs couleurs et aussi leur saveur …